My French Translation of Dharmagupta's Chinese translation (Sui Dynasty)
This is a small part of my PhD dissertation in French. I would like to share my French translation of the sutra based on my reconstruction of the Sanskrit version by using Dharmagupta's Chinese "unfinished" translation. Here "unfinished" means that the team at the end of the Sui Dynasty did not have time to finish the last steps; as a result, the Chinese characters are still following the syntax of the original Sanskrit. I used this word for word translation and I rebuilt the Sanskrit text, then I translated it into French.
《金剛能斷般若波羅蜜經》(大藏經,T08/N238),隋達磨笈多法師(Dharmagupta)譯
Dharmagupta around AD 605 (T.D. 238.8.766c-771c)
Vajracchedikā Prajñāpāramitā Sūtra
能斷金剛般若波羅蜜多經
Sutra du couperet de diamant de transcendance de la sapience
Traduit par le Tripitaka Dharmagupta de la dynastie des Sui
Hommage à la multitude de tous les bouddhas et bodhisattvas !
[Section 1] Voici ce que j’ai entendu lorsque le Bienheureux se promenait à Sravasti, dans le bois de Jeta, à l’intérieur du parc d’Anathapindada, entouré d’une grande assemblée formée de 1250 moines.
Or donc, le Bienheureux, bien avant l’heure du déjeuner, enfila sa robe monastique, prit son bol aux aumônes et entra dans la grande cité de Sravasti afin d’y mendier sa nourriture. Le Vénéré mangea le riz cuit qu’il venait de mendier dans la capitale Sravasti, se débarrassa de son bol aux aumônes, se lava les pieds; le Bienheureux s’assit sur le siège préparé à son intention, croisa ses jambes, redressa son corps et plaça son attention sur l’objet de sa méditation. C’est alors que de nombreux moines vinrent devant le Vénéré, saluèrent les pieds du Bienheureux en inclinant la tête, tournèrent trois fois par la droite autour du Vénéré puis s’assuyèrent tous du même côté.
English
Homage to the multitude of all Buddhas and Bodhisattvas!
This is what I heard when the Blessed One was dwelling in Sravasti, in the wood of Jeta, inside the park of Anathapindada, surrounded by a large assembly formed by 1250 monks. During lunch time, he put on his monastic robe, took his alms bowl and entered the great city of Sravasti to beg for his food. The Venerable ate the cooked rice he had just begged for in the capital Sravasti, got rid of his alms bowl, washed his feet; the Blessed One sat down on the seat prepared for him, crossed his legs, straightened his body and placed his attention on the object of his meditation. It was then that many monks came in front of the Venerable, saluted the feet of the Blessed One by bowing their heads, turned three times to the right around the Venerable, and then all sat down on the same side.
[Section 2] A ce moment, l’honorable Subhuti vint à cette assemblée et s’assit. Alors, l’honorable Subhuti se leva de son siège, mit sa robe monastique sur une épaule, plaça son genou droit sur le sol, fit l’anjali et dit:
“C’est merveilleux, Vénéré… comment les grands êtres d’éveil ont été favorisés de la plus grande faveur par le Tathagata, saint parfaitement éveillé ! Bienheureux ! Comment doit-on s’engager sur la voie du Bodhisattva ? Comment doit-on l’atteindre ? Comment doit-on dompter ses pensées ?”
A ces mots, le Bienheureux répondit ainsi à l’honorable Subhuti: “Très bien ! Très bien ! Subhuti ! C’est ainsi, Subhuti, c’est ainsi ! Les grands êtres d’éveil ont été favorisés de la plus grande faveur par le Tathagata, les grands êtres d’éveil ont été instruits du meilleur enseignement par le Tathagata. Par conséquent, Subhuti, écoute bien et sois très attentif, je te dirai, comment on doit s’engager sur la voie du bodhisattva, comment on doit l’atteindre et comment on doit dompter ses pensées.”
“Qu’il en soit ainsi, Vénéré”, dit l’honorable Subhuti désireux d’entendre le Bienheureux.
English
At this time, the Honorable Subhuti came to this assembly and sat down. Then, the honorable Subhuti rose from his seat, put his monastic robe on one shoulder, placed his right knee on the ground, did the anjali and said:
“Wonderful, Revered One… how great beings of enlightenment have been favored with the greatest favor by the Tathagata, the perfectly enlightened saint! Blessed One! How should one embark on the path of the Bodhisattva? How should we reach it? How should one tame one's thoughts?
At these words, the Blessed One answered the honorable Subhuti thus: “Very good! Very well ! Subhuti! So it is, Subhuti, so it is! The great enlightened beings have been favored with the greatest favor by the Tathagata, the great enlightened beings have been instructed with the best teaching by the Tathagata. Therefore, Subhuti, listen well and pay close attention, I will tell you, how one should enter the bodhisattva path, how one should attain it and how one should tame one's thoughts.”
“So be it, Revered One,” said the Honorable Subhuti eager to hear the Blessed One.
[Section 3] Le Bienheureux lui parla ainsi: “En ce monde, Subhuti, on doit produire la pensée suivante pour s’engager sur la voie du bodhisattva: tous les êtres vivants, Subhuti, tel que l’on appréhende le terme “êtres vivants”, c’est-à-dire nés d’un oeuf, nés d’une matrice, de l’humidité ou par transformation, avec ou sans forme, avec ou sans conscience mentale, sans l’une ni l’autre; aussi loin que l’on puisse concevoir le monde des êtres vivants, tous, je les conduirai dans le monde du nirvana qui ne laisse rien derrière, en vérité, meme si un nombre incalculable d’êtres vivants est allé au delà des peines, pas un seul être vivant n’a été conduit au nirvana final. Pour quelle raison ? Si, Subhuti, les grands êtres d’éveil entretiennent l’idée d’être, ils ne doivent pas être appelés ‘êtres d’éveil’. Pourquoi ? Personne, Subhuti, ne doit-être appelé ‘être d’éveil’, pour lequel devrait se produire l’idée d’être ou se produire l’idée de force vitale ou d'individu.
English
The Blessed One spoke to him thus: “In this world, Subhuti, one must produce the following thought to embark on the path of the bodhisattva: all living beings, Subhuti, as apprehended by the term ‘living beings’, that is, born from an egg, born from a matrix, from moisture or by transformation, with or without form, with or without mental consciousness, without either; As far as one can conceive of the world of living beings, I will lead them into the world of nirvana which leaves nothing behind; in truth, even if an incalculable number of living beings have gone beyond sorrows, not a single living being has been led to the final nirvana. Why? If, Subhuti, the great beings of awakening maintain the idea of being, they should not be called 'beings of awakening'. Why? No one, Subhuti, should be called 'being of enlightenment', for whom the idea of being or the idea of life force or individual should be produced.”
[Section 4] De plus, Subhuti, un grand être d’éveil doit faire acte de générosité en n’ayant le mental fixé sur aucune chose, il doit faire acte de générosité en n’ayant le mental fixé nulle part, il doit faire acte de générosité en n’ayant le mental fixé sur aucune forme, il doit faire acte de générosité en n’ayant le mental fixé sur aucun son, sur aucune odeur, sur aucun goût et sur aucune notion de cause efficiente. Pour quelle raison ? Parce que si le mental d’un grand être d’éveil n’est pas fixé quand il fait acte de générosité, le mérite qu’il obtiendra, Subhuti, sera incalculable.
Qu’en penses-tu, Subhuti ? Peut-on mesurer l’étendue d’espace dans la direction de l’est ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Bienheureux !”
Le Vénéré dit: “Peut-on mesurer l’étendue d’espace dans la direction du sud, de l’ouest et du nord, ainsi que dans les directions intermédiaires, plus le zénith et le nadir ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Bienheureux !”
Le Bienheureux dit: “C’est ainsi, Subhuti ! C’est ainsi, quand un grand être d’éveil fait acte de générosité avec un mental non-fixé, le mérite qu’il obtient, Subhuti, est incommensurable.
Encore une fois, Subhuti, c’est ainsi, ceux qui s’engagent sur la voie du bodhisattva doivent faire acte de générosité en n’ayant pas le mental fixé sur la notion de cause efficiente.
English
Moreover, Subhuti, a great Bodhisattva must make an act of generosity by not having the mind fixed on anything, he must make an act of generosity by having the mind fixed nowhere, he must make an act of generosity by not having the mind fixed on any form, he must make an act of generosity by not having the mind fixed on any sound, on no smell, on no taste and on no notion of efficient cause. Why? Because if the mind of a great Bodhisattva is not fixed when he makes an act of generosity, the merit he will get, Subhuti, will be incalculable.
What do you think, Subhuti? Can we measure the extent of space in the direction of the east?"
Subhuti replied, "Surely not, Blessed One!"
The Venerable says: "Can we measure the extent of space in the direction of south, west and north, as well as in the intermediate directions, plus the zenith and the nadir?"
Subhuti replied, "Surely not, Blessed One!"
The Blessed One said, "It is so, Subhuti! Thus, when a great bodhisattva makes an act of generosity with an unfixed mind, the merit he obtains, Subhuti, is immeasurable. Again, Subhuti, it is so, those who embark on the path of the bodhisattva must make an act of generosity by not having the mind fixed on the notion of efficient cause.
[Section 5] Qu’en penses-tu, Subhuti ? Le Tathagata doit-il être perçu au travers des marques caractéristiques ?
Subhuti répondit: “Non, Bienheureux, le Tathagata ne doit pas être perçu au travers des marques caractéristiques.”
A ces mots, le Vénéré dit à l’honorable Subhuti: “Partout où il y a possession des marques caractéristiques, Subhuti, il y a illusion; partout où il n’y a pas possession des marques caractéristiques, il n’y a pas la dénomination ‘illusion’. Le Tathagata doit être vu par la présence et par l’absence des marques caractéristiques.
[Section 6] A ces paroles, l’honorable Subhuti dit au Bienheureux: “Y aura-t-il, Vénéré, y aura-t-il dans le futur, durant la dernière période, à la fin des temps, au dernier moment, au cours des 500 dernières années, au moment du déclin de la bonne loi, des êtres qui, instruits par un tel sutra, produiront une véritable compréhension ?”
Le Bienheureux dit: “Ne dis pas cela, toi Subhuti ! Encore une fois, Subhuti, il y aura dans le futur, durant les 500 dernières années, des grands êtres d’éveil doués d’excellentes qualités, de vertu morale et de sapience, chez qui la [véritable compréhension] la bonne loi se produira et aura lieu; de nouveau, Subhuti, ces grands êtres d’éveil ne serviront pas seulement un bouddha unique et ne planteront pas les racines de leurs mérites près d’un seul éveillé. Mais encore une fois, Subhuti, il n’y aura de grands êtres d’éveil qui ne serviront pas uniquement un seul bouddha, mais des centaines de milliers de bouddhas, près desquels ils planteront les racines de leurs mérites.
Ils obtiendront une pensée de confiance [en écoutant] l’enseignement d’un tel sutra et ceux-là, Subhuti, le Tathagata les connaîtra grâce à son savoir d’éveillé et les verra grâce à son oeil d’éveillé. Eux tous, Subhuti, produiront et obtiendront une quantité incommensurable de mérites. Pour quelle raison ? Parce que, Subhuti, ces grands êtres d’éveil ne produiront pas la notion d’ego, ne produiront pas la notion d’être, ni celle de force vitale, ni celle d’individu particulier. Ces grands êtres d’éveil n’auront pas non plus à l’esprit la connaissance de la Doctrine, ils n’auront pas à l’esprit de notion ou d’absence de notion. Pour quelle raison ? Si, Subhuti, les grands êtres d’éveil produisaient la notion de Loi, ils croiraient en l’idée d’ego, en l’idée d’être, en l’idée de force vitale et en l’idée d’individu particulier. S’ils produisaient la notion d’absence de la Doctrine, ils croiraient en l’idée d’ego, en l’idée d’être, en l’idée de force vitale et en l’idée d’individu particulier. Pour quelle raison ? Encore une fois, Subhuti, un grand être d’éveil ne devrait appréhender ni Doctrine ni absence de Doctrine.
C’est pourquoi le Tathagata a prononcé l’énigme suivante: ‘Ceux qui savent que les enseignements s’apparentent à un radeau, doivent abandonner ces mêmes enseignements et à plus forte raison les non-enseignements’.
[Section 7] De nouveau, le Bienheureux s’adressa à l’honorable Subhuti: “Qu’en penses-tu, Subhuti, le Tathagata, parfaitement et complétement éveillé, possède-t-il quelque qualité d’éveil parfait et complet ou quelque doctrine qui puisse être enseignée ?”
Subhuti répondit: “Bienheureux ! Selon ma compréhension du sens de ses paroles, le Vénéré ne possède aucune qualité d’éveil parfait et complet; il n’existe aucune doctrine enseignée par le Tathagata. Pourquoi ? Parce que la qualité [d’éveil parfait] du Tathagata est insaisissable et inexprimable, elle n’est ni doctrine ni non-doctrine. Pour quelle raison ? Les saints personnages se distinguent par ce qui est non-conditionné.
[Section 8] Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, si un fils ou une fille de bonne famille remplissait ce système cosmique d’un milliard d’univers avec les sept choses précieuses et les offrait aux Tathagata, saints parfaitement et pleinement éveillés, qu’en penses-tu, Subhuti, ce fils ou cette fille de bonne famille engendrerait-il beaucoup de mérites ?”
Subhuti répondit: “Beaucoup, Bienheureux, beaucoup, Bien-allé ! La quantité de mérites que produirait ce fils ou cette fille de bonne famille en cette occasion serait grande. Pourquoi ? Parce que le Tathagata a parlé de cette quantité de mérites comme étant une non-quantité. Ainsi, il a désigné cette quantité de mérites comme étant une quantité de mérites.”
Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, si d’un côté, un fils ou une fille de bonne famille remplissait ce système cosmique d’un milliard d’univers avec les sept choses précieuses et les offrait aux Tathagata, saints parfaitement et pleinement éveillés, et si d’un autre côté, il retenait puis enseignait ne serait-ce que quatre strophes de cet enseignement sur la Doctrine, le prenait et le transmettait à d’autres, en cette occasion, la quantité de mérites qu’il produirait serait incalculable et incommensurable. Pourquoi ? La plénitude parfaite et suprême des Tathagatas, saints parfaitement éveillés, en est issue; les bouddhas, les Bienheureux en sont issus. Pourquoi ? Les enseignements d’un bouddha, Subhuti, ces enseignements d’un bouddha sont des non-enseignements. C’est pourquoi on les appelle ‘enseignements d’un bouddha’.”
[Section 9] Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, Celui-entré-dans-le-courant a-t-il à l’esprit: ‘J’ai obtenu le fruit d’entrée dans le courant’ ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Vénéré. Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas entré dans quoi que ce soit. C’est pourquoi on l’appelle ‘Entré dans le courant’. Il n’est pas entré dans la forme, il n’est pas entré dans le son, l’odeur, la saveur, le tangible ou les activités mentales. C’est pourquoi on l’appelle ‘Entré dans le courant’. Bienheureux ! Si Celui entré-dans-le-courant pensait: ‘J’ai obtenu le fruit d’entrée dans le courant’, il appréhenderait le concept d’ego, il appréhenderait le concept d’être, le concept de force vitale et celui d’une individualité.”
Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, Celui-qui-revient-une-fois a-t-il à l’esprit: ‘J’ai obtenu le fruit de retour unique’ ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Vénéré. Pourquoi ? Il n’y a pas d’Etre revenu-une-fois qui pense: ‘J’ai obtenu le fruit de retour unique’. Rien n’est obtenu par Celui qui est revenu-une-fois. Pour quelle raison ? Parce qu’il n’existe pas de ‘retour unique’. C’est pourquoi on parle de ‘retour unique’.”
Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, Celui-qui-ne-revient-plus a-t-il à l’esprit: ‘J’ai obtenu le fruit de non-retour’ ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Vénéré. Pourquoi ? Il n’y a pas de non-retour. C’est pourquoi on parle de ‘non-retour’.”
Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, le saint a-t-il à l’esprit: ‘J’ai obtenu le fruit d’un saint’ ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Vénéré. Pourquoi ? Il n’existe rien, Bienheureux, qui [porte] le nom de ‘saint’. C’est pourquoi on l’appelle un ‘saint’. Vénéré ! Si le saint pensait: ‘J’ai obtenu l’état de saint’, il appréhenderait le concept d’ego, il appréhenderait le concept d’être, le concept de force vitale et celui d’une individualité. Pour quelle raison ? Bienheureux, je suis celui que le Tathagata, saint parfaitement et pleinement éveillé, a déclaré être le meilleur de ceux qui demeurent en paix. Je suis un saint exempt de passion. Bienheureux ! Je ne pense pas ainsi: ‘Je suis un saint’. Si moi, Vénéré, j’avais à l’esprit la pensée suivante: “J’ai obtenu l’état de saint’, le Tathagata n’aurait pas dit de moi: ‘Subhuti, ce fils de bonne famille, est le meilleur de ceux qui demeurent en paix, il n’a nul point d’appui. C’est pourquoi on l’appelle celui qui demeure sans passions, celui qui demeure sans passions.’”
[Section 10] Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, y a-t-il un quelconque enseignement que le Tathagata a reçu de Dipamkara, saint parfaitement et pleinement éveillé ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Vénéré. Il n’existe pas d’enseignement que le Tathagata a reçu de Dipamkara, saint parfaitement et pleinement éveillé.”
Le Bienheureux dit: “Subhuti ! Si un grand être d’éveil disait: ‘Je vais construire de merveilleux arrangements dans [ma] sphère d’activité’, il s’exprimerait faussement.
Pourquoi ? ‘De merveilleux arrangements dans ma sphère d’activité’, Subhuti, le Tathagata a dit qu’il n’existe pas ‘de merveilleux arrangements dans une sphère d’activité’. C’est pourquoi on parle de ‘de merveilleux arrangements dans une sphère d’activité’.
Subhuti, un être d’éveil doit produire une pensée sans appui, il ne doit pas produire une pensée avec appui dans la forme, il ne doit produire une pensée avec appui ni dans le son, ni dans l’odeur, ni dans la saveur, ni dans le tangible, ni dans les activités mentales. La pensée ne doit s’appuyer sur rien.
Subhuti, imagine une personne dont le corps aurait la taille du roi des monts, le mont Sumeru. Qu’en penses-tu, Subhuti, son corps serait-il gigantesque ?”
Subhuti répondit: “Immense, Bienheureux, immense, Bien-allé, serait son corps ! Son corps, Vénéré, son corps, le Tathagata l’a déclaré comme étant un non-corps. C’est pourquoi il parle d’un ‘corps’. Cela n’existe pas, Vénéré. C’est pourquoi on parle d’un ‘corps’.”
[Section 11] Le Bienheureux dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, s’il y avait autant de fleuves [comme] le Gange qu’il y a de grains de sable dans le Gange, ces grains de sable seraient-ils nombreux ?”
Subhuti dit: “Vénéré ! Si les fleuves Ganges étaient si nombreux, que dire alors de la quantité de leurs grains de sable !”
Le Bienheureux dit: “Je vais t’expliquer et te faire connaître ceci: si un homme ou une femme emplissait des sept choses précieuses des univers aussi nombreux que ces fleuves Ganges et les offrait aux Tathagatas, saints parfaitement et pleinement éveillés, qu’en penses-tu, Subhuti, la quantité de mérites produite par cet homme ou par cette femme serait-elle grande ?”
Subhuti dit: “Oui, Vénéré ! Oui, Bien-allé ! Cet homme ou cette femme produirait un mérite incommensurable et incalculable.”
Le Bienheureux dit: “Quinconque retient une strophe de quatre lignes de cet enseignement et l’expose à autrui produira une quantité de mérites incommensurable et incalculable, plus grande que celle dérivée du don fait aux Tathagatas, saints parfaitement et pleinement éveillés, de ces univers remplis des septs choses précieuses.
[Section 12] En outre, cette partie de la terre sur laquelle aura été récitée ou enseignée cette strophe de quatre lignes deviendra une véritable pagode pour le monde des dieux, des hommes et des esprits; que diront nous alors, Subhuti, de ceux qui apprendront, liront et comprendront ce sutra en entier puis l’expliqueront à d’autres ! Ils seront détenteurs d’une sublime merveille. En ce lieu de la terre, Subhuti, il y aura une succession de ces endroits respectables; dans ces endroits-là, il y aura des sages à la conduite vertueuse.
[Section 13] A ces mots, l’honorable Subhuti parla ainsi au Bienheureux: “Bienheureux ! Comment s’appelle ce discours sur la Doctrine et comment puis-je le retenir ?”
A ces mots; le Vénéré répondit précisément à l’honorable Subhuti: “Le nom de ce discours sur la Doctrine, Subhuti, est ‘la transcendance de sapience’, retiens-le comme tel. Pour quelle raison ?
Subhuti! Ce que le Tathagata appelle la ‘transcendance de la sapience’, juste cela n’est pas une transcendance. C’est pourquoi on parle de ‘transcendance de la sapience’.
Qu’en penses-tu, Subhuti, existe-t-il une Doctrine enseignée par le Tathagata ?”
Subhuti dit: “Certes non, ce n'est pas ainsi, Vénéré ! Il n’existe pas, Bienheureux, de Doctrine enseignée par le Tathagata.
Le Bienheureux dit: “Les particules de poussière dans un système cosmique d’un milliard d’univers, est-ce beaucoup ?”
Il répondit: “Nombreuses, Vénéré, nombreuses, Bien-allé, sont ces particules de poussière. Quelle en est la cause ? Cette sorte de particule de poussière, d’après ce qui est dit par l’Ainsi-allé, n’est pas une particule. C’est pourquoi il l’appelle ‘particule de poussière’. De même, ce que l’Ainsi-allé appelle ‘univers’, n’est pas un univers. C’est pourquoi on le nomme ‘univers’.
Le Vénéré dit: “Qu’en penses-tu, Subhuti, doit-on percevoir l’Ainsi-allé, saint parfaitement et pleinement éveillé, au travers des trente-deux marques caractéristiques d’un grand homme ?”
Il répondit: “Certes non, Vénéré. On ne doit pas percevoir l’Ainsi-allé, saint parfaitement et pleinement éveillé, au travers des trente-deux marques caractéristiques d’un grand homme. Pour quelle raison ? L’Ainsi-allé dit que chacune des trente-deux marques caractéristiques d’un grand homme est une non-marque. C’est pourquoi il dit ‘les trente-deux marques caractéristiques d’un grand homme’.”
Le Vénéré dit: “Certes, mais de nouveau, Subhuti, si d’un côté une femme ou un homme faisait don de sa personne, jour après jour, autant de fois qu’il y a de grains de sable dans la rivière du Gange et si d’un autre côté, quelqu’un entendait ce discours sur la Doctrine et n’en retenait ne serait-ce que quatre vers, qu’il enseignerait alors à d’autres, celui-là assurément, en cette occasion, produirait un mérite incommensurable et incalculable.”
[Section 14] C’est alors que l’honorable Subhuti, brutalement éclairé par la Doctrine, fondit en larmes. Apris avoir séché ses larmes, il s’adressa au Bienheureux: “Comme il est étonnant, Vénéré, oui comme il est supremement étonnant, Bien-allé, ce discours sur la Doctrine tel qu’il vient de m’être enseigné par l’Ainsi-allé et qui m’a permis d’être éveillé ! Jamais je n’ai entendu un tel discours sur la Doctrine. Vénéré ! Ceux qui entendront clairement ce sutra prononcé ici-même en ce jour connaîtront un grand choc. Emerveillés, supremement émerveillés, seront les êtres qui auront engendré une véritable compréhension des enseignements de ce sutra. Pour quelle raison ? Cela, Bienheureux, qui est une véritable compréhension n’est bien sûr pas une compréhension.”
A quoi l’Ainsi-allé répondit: “Une véritable compréhension, une véritable compréhension. “Vénéré, je ne suis pas étonné d’être prêt à entendre l’essence de la loi, depuis que j’y ai porté mon attention. Bienheureux, les êtres vivants qui, dans le futur, accepteront ce dicours sur la Doctrine, le retiendront, le liront et le maîtriseront, seront pris d’un suprême émerveillement. Mais de nouveau, Vénéré, la notion d’ego ne viendra pas à l’esprit des grands êtres d’éveil, le concept d’être vivant ne leur viendra pas à l’esprit, ni celui d’âme ou d'individu. Pourquoi ? Parce que tous les éveillés, les bienheureux, sont allés au delà de toute conception.”
A ces mots, le Vénéré répondit précisument à l’honorable Subhuti: “C’est ainsi, c’est ainsi, Subhuti ! C’est ainsi, c’est ainsi, c’est comme tu dis, émerveillés, supremement émerveillés, seront les êtres qui ne seront pas terrifiés, ne trembleront pas de peur, ne seront pas pris d’effroi par les enseignements de ce sutra. Et Pourquoi ? Ceci, Subhuti, le Tathagata l’a décrit comme étant ‘la plus grande perfection’. Et ce qui est appelé par le Tathagata ‘la plus grande perfection’ l’est également par un nombre incommensurable d’éveillés, de Bienheureux. C’est pourquoi on parle de ‘la plus grande perfection’. Mais encore, Subhuti, ce qui est la perfection de patience du Tathagata, juste cela n’est pas une perfection. Et pourquoi en est-il ainsi ? Quand, Subhuti, un roi démoniaque taillada la chair de tous mes membres et de mes organes, j’eus, en cette occasion, le sentiment de non-conception de l’ego, de non-conception d’une force vitale et de non-conception d’une individualité. En outre, à cet instant, le concept de blessure ne me vint pas non plus à l’esprit.
Pourquoi ? Subhuti, qu’apparaisse à cet instant la notion d’ego et le concept de blessure aurait également surgi. Subhuti, je me rappelle cinq cents transmigrations passées, au cours desquelles j’étais un sage prêcheur de patience. Là encore, je ne concevais pas d’ego, pas plus que d’être vivant, ni d’âme ou d’individualité. Par conséquent, Subhuti, ces êtres d’éveil, ces grands êtres ayant abandonné toute conception produiront et obtiendront une immense et incalculable quantité de mérite.
[Section 15] De plus, Subhuti, si un homme ou une femme de bonne famille, le matin, renonçait à autant de ses corps qu’il y a de grains de sable dans le Gange, et qu’il fasse de même l’après-midi et le soir, et que, pour des centaines de milliers de millions de périodes cosmiques, il offre un tel nombre de corps, et que d’autre part une personne, ayant écouté cet enseignement, ne le rejette pas, elle produira en cette occasion un immense quantité de mérites, incalculable et incommensurable. Que dire alors d’une personne qui, apris l’avoir porté par écrit, l’accepte, le garde, le lit, le comprend et le dispense largement à autrui ! En outre, Subhuti, ce discours sur la Doctrine est inconcevable et inégalable; le Tathagata a enseigné ce discours sur la Doctrine pour les êtres engagés sur le véhicule du bodhisattva. Ceux qui accepteront, liront, comprendront cet enseignement et le transmettront à autrui, le Tathagata les connaîtra, il les verra, et tous ces êtres munis d’une quantité de mérites incalculable, incommensurable, inconcevable et illimitée, tous ces êtres vivants porteront mon éveil sur leurs épaules. Pour quelle raison ? Il n’est point possible que ce discours sur la Doctrine soit entendu par des êtres vivants peu résolés. Pas plus qu’il n’est possible qu’il soit entendu, pris…maîtrisé par ceux qui croient en la notion d’ego, de force vitale ou d’individualité. Une telle situation ne peut se produire.
Mais encore, Subhuti, quelle que soit la partie de la terre sur laquelle ce sutra sera proclamé, cette partie de la terre deviendra objet de culte. Cette partie de la terre sera pour le monde, avec ses dieux, ses êtres humains et ses esprits, une pagode dont il faudra faire le tour avec adoration.
[Section 16] Subhuti, ces fils et ces filles de bonne famille qui comprendront les sutras de cette manière… les maîtriseront, seront ridiculisés et sévèrement ridiculisés. Mais, au delà du ridicule de ces êtres, leurs actes méchants, sans mérites, accomplis dans leurs vies passées, qui auraient dû les conduire à un destin moins fortuné, seront ici et maintenant épuisés, et ils réaliseront l’illumination d’un bouddha.
Subhuti, je me souviens de cela: dans le passé, durant d’incalculables et bien plus qu’incalculables éons, avant l’avénement du Tathagata, saint parfaitement et pleinement éveillé Dipamkara, il y avait 84 centaines de milliers de millions de milliards de bouddhas qui me pretèrent attention, et parce qu’ils me pretèrent attention, ils ne furent pas négligés.
Si, Subhuti, après avoir porté attention à ma personne, tous ces bouddhas ne me négligèrent pas, et si, à la fin des temps, quand les cinq cents dernières années auront commencé, certains prendront ces sutras…les maîtriseront, alors, Subhuti, la quantité de mérites résultant des premiers n’approchera même pas d’un centième la quantité de mérites des derniers, ni d’un millième, ni d’un cent millième. Cette quantité de mérites ne peut être ni énumérée, ni partagée, ni calculée, ni comparée ni appruciée, ni atteinte. Subhuti, ces êtres vivants, ces fils et ces filles de bonne famille vont alors acquérir une telle quantité de mérites que, si je déclarais leur quantité de mérites, ces fils et ces filles de bonne famille qui écoutent cette déclaration, à cet instant, deviendraient fous et seraient complétement désorientés. Mais de nouveau, Subhuti, ce discours sur la Doctrine est hors de portée de la compréhension, ‘hors de portée de la compréhension’, tel est son effet.”
[Section 17] Alors, l’honorable Subhuti parla en ces termes au Bienheureux: “Vénéré ! Comment doit-on s’engager sur la voie du Bodhisattva ? Comment doit-on l’atteindre ? Comment doit-on dompter ses pensées ?”
Le Bienheureux dit: “En ce lieu, Subhuti, celui qui s’est engagé sur la voie du bodhisattva devrait produire la pensée suivante: ‘Je dois mener tous les êtres vivants à réaliser le nirvana final, à se trouver dans le domaine du nirvana qui ne laisse rien derrière. Mais apris avoir conduit tous les êtres vivants au nirvana final, penser qu’il n’y a pas un seul être vivant à conduire au nirvana final.’ Et pourquoi ? Si, Subhuti, le concept d’être vivant venait à l’esprit d’un être d’éveil, ou le concept de force vitale, ou celui d’invidualité, il ne serait pas appelé ‘un être d’éveil’. Pourquoi ? Subhuti, ce qu’on appelle ‘quelqu’un qui s’est engagé sur la voie du bodhisattva’ n’est pas une chose. Qu’en penses-tu, Subhuti, existe-t-il une qualité qui puisse éveiller le Tathagata, en présence du Tathagata Dipamkara, d’un éveil suprême, parfait et complet?”
L’honorable Subhuti parla en ces termes au Bienheureux: “Bienheureux, la qualité qui a éveillé le Tathagata, en présence du Tathagata Dipamkara, saint parfaitement et pleinement éveillé, d’un éveil suprême, parfait et complet, n’est pas une qualité.
Le Bienheureux répondit en ces termes à l’honorable Subhuti: “C’est ainsi, Subhuti, c’est ainsi, il n’existe pas de qualité qui puisse éveiller le Tathagata, en présence du Tathagata Dipamkara, saint parfaitement et pleinement éveillé, d’un éveil suprême, parfait et complet. Si le Tathagata possédait quelque qualité d’éveil parfait, le Tathagata Dipamkara ne m’aurait pas prédit ceci: ‘Toi, jeune homme, tu seras dans une époque future un Tathagata, saint parfaitement et pleinement éveillé du nom de Sakyamuni.’ Pour quelle raison? ‘Tathagata’, Subhuti, est une désignation de l’ainsité. ‘Tathagata’,
Subhuti, désigne la production non-conditionnée. ‘Tathagata’, Subhuti, exprime la destruction des qualités. ‘Tathagata’, Subhuti, désigne ce qui n’a pas d’origine. Pourquoi ? La non-origine est la vérité suprême. Subhuti, c’est ainsi qu’il faut parler: ‘La suprême, parfaite et complète illumination est suprêmement, parfaitement et pleinement obtenue par le Tathagata.’ Mais ce qui est la suprême, parfaite et complète illumination, suprêmement, parfaitement et pleinement obtenue par le Tathagata, n’est pas une qualité. ‘La qualité qui est suprêmement, parfaitement et pleinement obtenue par le Tathagata’, Subhuti, en cela, il n’y a ni vérité ni erreur.
A la suite de quoi, le Tathagata ajouta: ‘Tous les éléments constitutifs sont les éléments constitutifs d’un bouddha.’ Subhuti, tous les éléments constitutifs ne sont pas des éléments constitutifs. C’est pourquoi on parle de ‘tous les éléments constitutifs.
Suppose par exemple, Subhuti, qu’il y ait un homme doté d’un corps, d’un grand corps.” Subhuti dit: “Bienheureux ! Le corps immense dont cet homme est possesseur, le Tathagata en a parlé comme étant un non-corps. C’est pourquoi on dit ‘un homme doté d’un corps, d’un grand corps’.”
Le Bienheureux dit: “C’est justement ainsi, Subhuti, un être d’éveil qui parlerait ainsi: ‘Je vais mener les etres vivants au nirvana final’, ne doit pas etre appeler un être d’éveil. Pourquoi ?
Subhuti, est-ce qu’il existe quelque chose qui se nomme ‘étre d’éveil’ ?”
Subhuti dit: “Certes non, Vénéré.”
Le Bienheureux dit: “A quoi le Tathagata répond: ‘Toute chose est exempte de la notion d’être vivant, d’âme ou d’individualité.’ Subhuti, un être d’éveil qui parlerait ainsi: ‘Je vais construire de merveilleux arrangements dans [ma] sphère d’activité’, ne doit pas non plus être appelé être d’éveil. Pourquoi? ‘De merveilleux arrangements dans ma sphère d’activité’, ‘de merveilleux arrangements dans une sphère d’activité’, Subhuti, le Tathagata a dit qu’ils ne sont pas ‘de merveilleux arrangements dans une sphère d’activité’. C’est pourquoi on parle de ‘de merveilleux arrangements dans une sphère d’activité’. Subhuti, cet être d’éveil qui est absorbé par l’idée suivante: ‘Les choses sont exemptes de la notion d’ego’, ‘les choses sont exemptes de la notion d’ego’, il est nommé ‘être d’éveil’, ‘être d’éveil’ par le Tathagata, saint pleinement et parfaitement illuminé.
[Section 18] Qu’en penses-tu, Subhuti, l’oeil de chair du Tathagata existe-t-il ?”
Subhuti répondit : “C’est ainsi, Bienheureux, l’oeil de chair du Tathagata existe.”
Le Bienheureux dit : “Qu’en penses-tu, Subhuti, l’oeil divin du Tathagata existe-t-il ?”
Subhuti répondit : “C’est ainsi, Bienheureux, l’oeil divin du Tathagata existe.”
Le Bienheureux demanda : “Qu’en penses-tu, Subhuti, l’oeil de sagesse du Tathagata existe-t-il ?”
Subhuti répondit : “C’est ainsi, Bienheureux, l’oeil de sagesse du Tathagata existe.”
Le Bienheureux demanda : “Qu’en penses-tu, Subhuti, l’oeil de la Doctrine existe-t-il ?”
Subhuti répondit : “C’est ainsi, Bienheureux, l’oeil de la Doctrine existe.”
Le Bienheureux dit : “Qu’en penses-tu, Subhuti, l’oeil d’éveil du Tathagata existe-t-il ?”
Subhuti répondit : “C’est ainsi, Bienheureux, l’oeil d’éveil du Tathagata existe.”
Le Bienheureux demanda: “Qu’en penses-tu, Subhuti, s’il y avait autant de fleuves Ganges qu’il y a de grains de sable dans le Gange, et s’il y avait autant de systèmes cosmiques qu’il y a de grains de sable dans tous ces Ganges, ces systimes cosmiques seraient-ils nombreux ?”
Subhuti répondit: “Oui, Bienheureux, oui, Bien-allé, ces systèmes seraient nombreux.”
Le Bienheureux dit: “Je pourrais connaître les différentes sortes de courants de pensée d’êtres vivants aussi nombreux que ceux de ces systèmes cosmiques. Et pourquoi ? ‘Courant de pensée’, ‘courant de pensée’, le Tathagata dit que ce n’est pas un courant. C’est pourquoi on parle de ‘courant de pensée’. Pour quelle raison ? Subhuti, une pensée qui s’est produite ne peut être appréhendée. Une pensée qui va se produire ne peut être appréhendée. Une pensée qui se produit ne peut etre appréhendée.
[Section 19] Qu’en penses-tu, Subhuti, si d’un côté, un fils ou une fille de bonne famille faisait en sorte que ce système cosmique d’un milliard d’univers fut rempli des sept joyaux et qu’il en fasse don, la quantité de mérites produite en cette occasion par ce fils ou cette fille de bonne famille serait-elle grande ?”
Subhuti dit: “Oui, Bienheureux, oui, Bien-allé.”
[Section 20] Qu’en penses-tu, Subhuti, le Tathagata doit-il etre perçu au travers du parfait développement de son corps physique ?”
Subhuti dit: “Certes non, Bienheureux. Ce n’est pas au travers du parfait duveloppement de son corps physique que le Tathagata doit etre perçu. Pourquoi est-ce ainsi ? ‘Un parfait développement de son corps physique’, ‘un parfait duveloppement de son corps physique’, le Tathagata dit que ce n’est pas un parfait développement. C’est pourquoi on parle ‘d’un parfait développement du corps physique’.”
Le Vénéré dit: “Que penses-tu, Subhuti ? Le Tathagata doit-il être perçu au travers de la possession de ses marques caractéristiques ?”
Il répondit: “Non, Bienheureux. Ce n’est pas au travers de la possession des marques caractéristiques que le Tathagata doit être perçu. Pour quelle raison ? Ce qui est appelé ‘possession des marques caractéristiques’ n’est pas ‘possession des marques caractéristiques de l’existence’. Le Tathagata parle simplement de ‘possession des marques caractéristiques’.”
[Section 21] Le Bienheureux dit: “Que penses-tu, Subhuti, le Tathagata entretient-il la pensée suivante: ‘J’ai enseigné la Doctrine’ ?”
Subhuti dit: “Certes non, Bienheureux, le Tathagata ne dit pas :‘J’ai enseigné la Doctrine’.”
Le Bienheureux dit: “Celui qui dirait: ‘Le Tathagata a enseigné la Doctrine’, Celui-là, Subhuti, dirait une contre-vérité, il me présenterait par une saisie fausse. Pourquoi ?
‘L’enseignement de la Doctrine’, ‘l’enseignement de la Doctrine’, Subhuti, ce n’est pas quelque chose qui puisse recevoir le nom ‘d’enseignement de la Doctrine’.
Alors, l’honorable Subhuti dit au Bienheureux: “Y aura-t-il, Vénéré, dans le futur, durant la dernière période, à la fin des temps, au dernier moment, au cours des 500 derniires années, au moment du déclin de la bonne loi, des êtres qui, instruits par un tel sutra, produiront une véritable compréhension ?”
Le Bienheureux dit: “Subhuti, ce ne sont ni des êtres ni des non-êtres. Pourquoi ? Tous les êtres vivants, Subhuti, le Tathagata les déclare des non-êtres. C’est pourquoi, on parle des ‘êtres vivants’.
[Section 22] Qu’en penses-tu. Subhuti, le Tathagata possède-t-il quelque qualité d’éveil suprême, parfait et complet?”
Le Bienheureux dit: “C’est ainsi, Subhuti, c’est ainsi. Même la plus petite qualité ne peut être vue ni obtenue en ce lieu. C’est pourquoi on dit: ‘éveil suprême, parfait et complet’.
[Section 23] Mais encore, Subhuti, cette qualité est pareille. Il n’y a pas de différence. C’est pourquoi on dit: ‘éveil suprême, parfait et complet.’ Au delà du fait qu’il n’y a pas d’ego, ni de force vitale, ni d’être vivant, ni d'individu, cet éveil suprême, parfait et complet est pleinement et parfaitement obtenu comme étant identique à toutes les qualités vertueuses, Subhuti, mais ces qualités vertueuses, le Tathagata dit que ce ne sont pas des qualités. C’est pourquoi on parle de ‘qualités vertueuses’.
[Section 24] Mais encore une fois, Subhuti, si quelqu’un, apris avoir collectionné des piles des sept choses précieuses en une masse égale à celle de la reine des montagnes, le Mont Sumeru, en ce lieu, dans le système cosmique d’un milliard d’univers, l’offrait en donation, et si quelqu’un d’autre, après avoir compris de cette Prajñāpāramitā ne serait-ce qu’un vers de quatre lignes, l’enseignerait à d’autres, Subhuti, la quantité de mérites du premier ne serait pas le centième de la quantité de mérites du dernier… elle est impossible à comparer.
[Section 25] Que penses-tu, Subhuti, le Tathagata entretient-il la pensée suivante: ‘J’ai libéré les êtres vivants’ ? Encore non, Subhuti, ce n’est pas ainsi qu’il faut voir les choses. Pourquoi ? Il n’est point d’êtres vivants que le Tathagata puisse sauver. De nouveau, Subhuti, s’il y avait des êtres vivants à libérer, cela signifierait que le Tathagata accepte le concept d’ego, la notion d’être vivant, celle d’une force vitale et l’idée d’une entité individuelle. ‘Se raccrocher au concept d’ego’, cela veut dire pour le Tathagata ne pas se raccrocher au concept d’ego, mais les êtres simples et ordinaires se raccrochent au concept d’ego. C’est pourquoi on dit ‘êtres simples et ignorants.
[Section 26] Qu’en penses-tu. Subhuti, le Tathagata doit-il être vu au travers de ses marques caractéristiques ?”
Subhuti répondit: “Certes non, Bienheureux. Si je comprends bien le sens des paroles du Bienheureux, le Tathagata ne doit pas être vu au travers de ses marques caractéristiques.”
Le Bienheureux dit: “Bravo ! Bravo ! Subhuti ! C’est ainsi, Subhuti, c’est comme tu le dis: on ne doit pas voir le Tathagata au travers de ses marques caractéristiques. Pourquoi ? Si, Subhuti, le Tathagata devait être vu au travers de ses marques caractéristiques, alors le roi qui fait tourner la roue serait un Tathagata. En conséquence, on ne doit pas voir le Tathagata au travers de ses marques caractéristiques. Ces marques du Tathagata doivent être vues comme des non-marques.”
L’honorable Subhuti dit au Bienheureux: “Vénéré, tel que je comprends le sens des paroles du Bienheureux, le Tathagata ne doit pas être perçu au travers de ses marques caractéristiques.”
Alors, de nouveau, le Bienheureux prononça les vers suivants: “
‘Ceux qui me voient en tant que forme
Ceux qui m’entendent en tant que son
se méprennent sur les efforts à accomplir
Ces gens-là ne me verront point
L’Eveillé doit être reconnu à partir de la Doctrine
Le Tathagata est le corps de la Doctrine
La vraie nature de la Doctrine est imperceptible
et nul ne peut la percevoir en tant qu’objet
[Section 27] Qu’en penses-tu. Subhuti, le Tathagata a-t-il parachevé son éveil sans supérieur et parfait à l’aide de ses marques caractéristiques ? De nouveau, Subhuti, n’envisage pas cela de cette manière. Pour quelle raison ? Subhuti ! Le Tathagata, l’éveillé parfaitement accompli, n’a pas parachevé son éveil sans supérieur et parfait à l’aide de ses marques caractéristiques. De nouveau, Subhuti, que personne ne te dise que Celui qui a emprunté le véhicule du bodhisattva a conçu la destruction ou l’annihilation de quelque phénomène. Subhuti, n’envisage pas cela de cette manière. Pour quelle raison ? Subhuti ! Ceux qui ont emprunté le véhicule du bodhisattva ne conçoivent ni la destruction ni l’annihilation de quelque phénomène.
[Section 28] De nouveau, Subhuti, si d’un côté, un fils ou une fille de bonne famille remplissait des sept joyaux autant de mondes qu’il y a de grains de sable dans le Gange, le grand fleuve, et qu’il en fasse don, et si d’un autre côté, un grand être d’éveil obtient la patience dans le non-ego et la non-production des caractéristiques de l’existence, ce dernier engendrera en cette occasion une quantité de mérites bien plus grande. Subhuti ! Le bodhisattva ne doit pas appréhender une quantité de mérites.”
L’honorable Subhuti dit: “Bienheureux ! Le bodhisattva ne doit-il pas acquérir une quantité de mérites ?”
Le Bienheureux dit: “Il doit l’acquérir, pas la saisir [intellectuellement]. C’est pourquoi on dit ‘il doit l’acquérir’.
[Section 29] Encore une fois, Subhuti, si quelqu’un disait: ‘Le Tathagata va et vient, se tient debout, s’assoit, s’allonge ou se couche’, celui-là, Subhuti, ne comprend pas le sens de mon enseignement. Pourquoi ? Subhuti ! Celui qu’on appelle le Tathagata ne va ni ne vient de nulle part. C’est pourquoi on l’appelle ‘le Tathagata, saint parfaitement éveillé’.
[Section 30] De nouveau, Subhuti, si un fils ou une fille de bonne famille broyait avec une force incalculable en atomes la matière d’autant de mondes qu’il y a de poussières dans ce système cosmique d’un milliard d’univers, et en fasse un amas des plus petits atomes, qu’en penses-tu, Subhuti, cet amas serait-il immense ?”
Subhuti dit: “C’est ainsi, Bienheureux, un amas des plus petits atomes serait immense. Pour quelle raison ? Si, Vénéré, il y avait un amas, le Bienheureux n’aurait pas parlé d’un‘amas des plus petits atomes’. Pourquoi ? Ce que le Tathagata appelle un ‘amas des plus petits atomes’, le Bienheureux dit que ce n’est pas un amas. C’est pourquoi on parle d’un ‘amas des plus petits atomes’. Ce que le Tathagata appelle ‘système cosmique d’un milliard d’univers’, il dit que ce n’est pas un systime. C’est pourquoi on parle d’un système cosmique d’un milliard d’univers. Pourquoi ?
Si, Bienheureux, il existait un monde, il y aurait l’idée de masse solide. Ce que le Bienheureux appelle ‘l’idée de masse solide’, le Tathagata dit que ce n’est pas ‘l’idée de masse solide’. C’est pourquoi on parle de ‘l’idée de masse solide’.
Le Bienheureux dit: “Subhuti, l’idée de masse solide est inexprimable et indécible. Ce n’est ni une chose ni une non-chose, et pourtant les gens simples et ordinaires l’appréhendent.
[Section 31] Pourquoi ? Si quelqu’un disait: ‘Le Tathagata parle de la notion d’ego, le Tathagata parle de la notion d’être, de la notion de force vitale et de la notion d’individualité’, parlerait-il justement ?”
Subhuti dit: “Certes non, Bienheureux, certes non, Bien-allé. Pourquoi ? Parce que, Bienheureux, la notion d’ego dont parle le Tathagata n’est pas une notion d’ego. C’est pourquoi on parle de ‘notion d’ego’.
Le Bienheureux dit: “En ce sens, Subhuti, celui qui s’est engagé sur la voie du bodhisattva devrait posséder la connaissance des phénomènes conditionnés et porter son attention sur eux. Et il devrait porter son attention tout en sachant que même ‘la conception de quelque chose’ n’existe pas.
Pourquoi ? ‘La conception de quelque chose’, ‘la conception de quelque chose’, Subhuti, le Tathagata dit que ce n’est pas une conception. C’est pourquoi on dit: ‘la conception de quelque chose’.
[Section 32] Mais encore, Subhuti, si un bodhisattva, un grand être, remplissait des sept précieux joyaux un nombre incommensurable et incalculable de systèmes cosmiques afin d’en faire donation, et si un fils ou une fille de bonne famille retenait de cette Prajñāpāramitā ne serait-ce qu’un vers de quatre lignes, le préservant, l’enseignant et le maîtrisant, assurément ce dernier produirait un mérite incommensurable et incalculable, bien plus grand que le premier. Comment l’exposera-t-il ? Il ne l’exposera pas. C’est pourquoi on dit: ‘il l’exposera’:
‘Comme une étoile filante, l’obscurité, une lampe,
une illusion, la rosée, une bulle d’eau,
un rêve, un éclair de lumière, un nuage,
c’est ainsi que l’on doit observer ce qui est conditionné.’”
C’est ce qu’enseigna le Vénéré.
Transportés de joie, Subhuti l’Ancien, les moines et les nonnes, les hommes et les femme laïques, et l’univers composé des dieux, des êtres humains, des esprits et des musiciens célestes, se réjouirent de l’enseignement du Bienheureux.
Hommage à la multitude de tous les bouddhas et bodhisattvas !
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The Diamond Sutra is a well-known sutra, even outside the Buddhist community, as it is at present the world’s oldest, dated, printed book (Chinese Buddhist scroll printed in 868; British Museum). Kumarajiva’s Chinese translation was made around 407 A.D., was printed in 868 A.D. and is still the most popular and the most widely read version of the Diamond Sutra. However, the original Sanskrit manuscript used by Kumarajiva to make his Chinese translation is now lost.
Among the Chinese translations, Dharmagupta’s version (T.238) is the only unfinished one. It could not be completed for two reasons: first, his work, financed by the emperor Yangdi (605-617), was interrupted by a civil war at the end of the Sui dynasty (581-618); second, Dharmagupta died in 619 A.D., just one year after the fall of the dynasty. Nobody resumed his translation of the Diamond Sutra as the members of his team separated. As a result, T.238 is unique and particularly valuable because the syntax of T.238 is still in the order of the original Sanskrit text, while the Sanskrit terminology has been totally translated into Chinese.
The Vajracchedika-prajnaparamita-sutra or "Diamond-Cutter Sutra of the Perfection of Wisdom", is a major work of the "Great Vehicle" (Mahayana). It is translated in Chinese by金剛般若波羅蜜經 Jin gang ban ruo bo luo mi jing (T.235, Vol. 8, pp.748, c-752, c). Chinese people generally call it金剛經 Jin gang jing (Vajra-sutra in sanskrit; Diamond Sutra in English).
The Diamond Sutra is part of a group of 40 sutras called Prajnaparamita Sutras or "Sutras of the Perfection of Wisdom". These texts emphasize the notion of vacuity (wunyata) and insist on the merits obtained by somebody who understands and diffuses the words of the Buddha. The Vajracchedika, probably written in India during the second or third century, was translated into Chinese by six monks between the beginning of the 5th and the beginning of the 8th century. Kumarajiva made his Chinese translation at the beginning of the 5th century (around 407 A.D.). After him, five other monks translated the sutra: Bodhiruci, Paramartha, Dharmagupta, Xuanzang and Yijing. The sutra was then translated in many other languages, notably in Tibetan and in Mongol. Very few Sanskrit original manuscripts of the Vajracchedika have been discovered so far and none of them correspond to any of the Chinese translations that remain nowadays.
Dharmagupta (達摩笈多Da mo ji duo) arrived in Chang’an, China, in 590, under the reign of emperor Wendi 文帝 (581-604 A.D.). He translated many sutras between 590 and 616 A.D. The Taisho attributes nine translations to Dharmagupta. No ancient catalogue attributes the translation of the Vajracchedika to him. The first mention can be found in a short biography made by Zhisheng 智昇, the author of開元釋教錄 Kai yuan shi jiao lu (completed in 730 A.D.).
In fact, it is now well-known that Dharmagupta’s translation of the Diamond Sutra began in 590, stopped for a while and continued between 605 and 616. Dharmagupta died in 619. This explains why his translation of the Diamond Sutra remained unfinished. "隋大業年中" (T.238, p.766, c) indicates that the sutra was translated between 605 and 617 under the reign of Yangdi 煬帝. Dharmagupta’s team was quite large and under the patronage of the emperor. Yangdi煬帝 was following closely the work of Dharmagupta, but when the civil war began, it was brutally interrupted.